Indications de l’épisiotomie
Quand faut-il pratiquer une épisiotomie ? En France, les professionnels de santé ont à leur disposition des recommandations officielles datant de 2005. Description des indications et non-indications à l’épisiotomie, et références et lexique en fin de page. Voir aussi ce manuel d’obstétrique très pédagogique
Il ne faut pas faire d’épisiotomie en routine ou en prévention
- faire une épisiotomie systématique n’apporte rien à la santé de la mère (haut niveau de preuve).
- faire une épisiotomie systématique n’apporte rien à la santé du bébé (niveau de preuve faible)
Recommandations de pratique clinique du Collège national des gynécologues-obstétriciens (2005) : « L’analyse de la littérature ne montre pas de bénéfices à une politique libérale d’épisiotomies par rapport à une utilisation restrictive, tant sur le versant foetal (Grade C) que maternel (Grade A). Par conséquent, la pratique libérale de l’épisiotomie n’est pas recommandée. »
Il n’y a pas d’indications médicales qui permettrait une épisiotomie systématique
Pour un premier enfant
- Vous ne devez pas avoir d’épisiotomie au prétexte que vous accouchez pour la première fois. Niveau de preuve moyen en 2005 au moment de la publication. Nous en sommes de plus en plus certain notamment parce que plusieurs maternités ont des taux d’épisiotomie inférieurs à 1 % ce qui implique des taux d’épisiotomie très bas y compris pour les femmes donnant naissance pour la première fois. Voir les taux d’épisiotomie en France et dans le monde
Recommandations de pratique clinique du Collège national des gynécologues-obstétriciens (2005) : « Il n’est pas recommandé de réaliser systématiquement une épisiotomie chez la primipare (Grade B). »
En cas de forceps, ventouses ou de “gros” bébé
- Il est possible de poser un forceps ou une ventouse sans épisiotomie (niveau de preuve moyen en 2005). Attendre un « gros » bébé n’est pas une indication (niveau de preuve faible en 2005).
Recommandations de pratique clinique du Collège national des gynécologues-obstétriciens (2005) : « Il n’y a pas de preuves pour recommander la pratique systématique de l’épisiotomie en cas de manoeuvres obstétricales ou lors d’une suspicion de macrosomie (Grade C). La pratique systématique de l’épisiotomie ne se justifie pas en cas d’extraction instrumentale (Grade B). Le taux de lésions périnéales sévères est augmenté lorsque l’extraction instrumentale est associée à l’épisiotomie (Grade B) mais le lien de cause à effet entre l’épisiotomie et les lésions périnéales sévères n’est pas établi. L’extraction par ventouse nécessite moins d’épisiotomies, et expose moins aux lésions périnéales sévères que le forceps (Grade A)”.
Dans le cas où la femme attend plusieurs enfants (jumeaux et plus) ou que le bébé est “mal” positionné
- Il est possible d’accoucher sans épisiotomie (accord professionnel)
Accord professionnel signifie que les gynécologues-obstétriciens se mettent d’accord sur la base de leur expérience pour prendre cette position sans que des études spécifiques aient été menées
Recommandations de pratique clinique du Collège national des gynécologues-obstétriciens (2005): « En cas de variété postérieure persistante, de présentation de la face, de présentation du siège ou d’accouchement gémellaire, il n’existe pas de preuves suffisantes pour indiquer la pratique systématique de l’épisiotomie (Accord professionnel) ».
En cas de risque de déchirure
- Lorsque l’épisiotomie n’est pas systématique mais au cas par cas le taux de périnées intacts est multiplié par trois et il n’y a pas d’augmentation des déchirures graves (niveau de preuve moyen en 2005)
Recommandations de pratique clinique du Collège national des gynécologues-obstétriciens (2005): ”Lorsque le périnée semble sur le point de se rompre au moment de l’expulsion, une pratique systématique de l’épisiotomie n’est pas nécessaire ; en effet dans cette situation, une politique restrictive de l’épisiotomie permet de multiplier par trois le taux de périnées intacts sans pour autant augmenter le risque de déchirures du troisième degré (Grade B).”
En cas de mutilation ou de déchirures graves antérieures
- L’épisiotomie ne doit pas être systématique
Recommandations de pratique clinique du Collège national des gynécologues-obstétriciens (2005): “Les antécédents de lésions périnéales du 3e et du 4e degré et les mutilations ne justifient pas une pratique systématique de l’épisiotomie.”
En cas de souffrance du bébé
- Faire une épisiotomie systématique n’améliore pas la santé du bébé à la naissance (niveau de preuve léger en 2005)
Recommandations de pratique clinique du Collège national des gynécologues-obstétriciens (2005): “Une politique libérale d’épisiotomies n’améliore pas l’état néonatal par rapport à une politique restrictive dans la population générale (Grade C). En cas de rythme cardiaque « non rassurant » pendant l’expulsion, il n’a pas été démontré que l’épisiotomie systématique améliorait l’état néonatal.”
En cas de “petit” poids du bébé, de retard de croissance ou de naissance prématurée
- Il n’y a pas de preuve de l’intérêt d’une épisiotomie systématique
Recommandations de pratique clinique du Collège national des gynécologues-obstétriciens (2005) : “Les Recommandations pour la Pratique Clinique du CNGOF de 1998 sur les modalités de naissance des enfants de faible poids concluaient à l’absence de données en faveur de la pratique systématique de l’épisiotomie chez le foetus prématuré ou atteint de retard de croissance in utero. Depuis cette date, aucun travail n’a modifié ces conclusions.”
Au cas par cas
- Une épisiotomie reste possible. Vous devez néanmoins être informée et donner votre consentement. Si vous n’avez pas de péridurale une anesthésie locale doit être pratiquée
Recommandations de pratique clinique du Collège national des gynécologues-obstétriciens (2005): “Dans toutes ces situations obstétricales spécifiques, une épisiotomie peut être judicieuse sur la base de l’expertise clinique de l’accoucheur (Accord professionnel).”
Références
Recommandations de 2005
Traité d’obstétrique, Masson (2010), Loïc Marpeau, Collège National des Gynécologues et Obstétriciens Français (CNGOF), Collège national des Sages-femmes, Association française des sages-femmes enseignantes françaises (ASFEF).
Chapitre sur l’épisiotomie (G.Bader) http://www.em-consulte.com/en/article/271519 en accès libre
Consulter la version complète dans la revue Journal de Gynécologie Obstétrique et Biologie de la Reproduction. JGOBR Vol 35 – Supplément 1 P. 7 – 135 (2006). Texte des recommandations pages 77 – 80, accès gratuit (il faut se créer un compte), en français http://www.em-consulte.com/revue/jgyn/35/S1
Ecouter et voir la présentation qui en a été faite lors des journées du CNGOF en novembre 2005 ainsi que la transcription faite par l’équipe d’épisiotomie info (sur le site Slideshare)
Contenu détaillé (tous ces articles sont accessibles gratuitement en ligne par le lien ci-dessus)
L’épisiotomie – Introduction pages 7 – 9 B. Jacquetin
L’épisiotomie – Méthode utilisée et questions abordées pages 10 – 11 F. Goffinet
L’épisiotomie – Quelles sont les données épidémiologiques concernant l’épisiotomie ? pages 12 – 23 F. Vendittelli, D. Gallot
L’épisiotomie – Épisiotomie et prévention des lésions pelvi-périnéales pages 24 – 31 R. de Tayrac, L. Panel, G. Masson, P. Mares
L’épisiotomie – Pratique libérale versus restrictive de l’épisiotomie : existe-t-il des indications obstétricales spécifiques de l’épisiotomie ? pages 32 – 39 D. Riethmuller, L. Courtois, R. Maillet
L’épisiotomie – Techniques chirurgicales de l’épisiotomie pages 40 – 51 E. Verspyck, L. Sentilhes, H. Roman, F. Sergent, L. Marpeau
L’épisiotomie – Soins apportés à l’épisiotomie en suites de couches pages 52 – 58 H. Faruel-Fosse
L’épisiotomie – Complications immédiates et à long terme de l’épisiotomie pages 59 – 67 B. Langer, A. Minetti
L’épisiotomie – Peut-on réduire le taux des épisiotomies ? pages 68 – 76 H. Faruel-Fosse, F. Vendittelli
Lexique
Politique restrictive ou libérale de l’épisiotomie
Restrictive : on essaie de ne pas en faire (sauf, en général, au cas où il faut sortir le fœtus rapidement pour des raisons médicales).
Libérale : on fait des épisiotomies systématiquement
Des recommandations de pratique clinique (RPC)
Revue des publications médicales disponibles et conclusions tirée des publications. Les publications ont plus ou moins de poids selon leur qualité méthodologique. Les recommandations qui en découlent ont un niveau de preuve
- Grade A, B, C : niveaux de preuve fort, moyen, faible
- Accord professionnel : c’est le niveau de preuves le plus faible, il s’agit de l’opinion et/ou expérience des rédacteurs.
Le Collège national des gynécologues obstétriciens français (CNGOF)
Société professionnelle ayant pour objet le développement et le progrès sous toutes leurs formes de la gynécologie et de l’obstétrique en France. http://www.cngof.asso.fr/
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